Pour une théorie pratique du changement ...
De nombreux travaux[1] conduisent aujourd’hui à souligner que le fonctionnement des systèmes éducatifs en Afrique Subsaharienne est caractérisé par une certaine forme d’entropie, qu’il est possible de définir comme un processus continu de gaspillage d’énergie et de dégradation constante de la qualité des systèmes dans ses multiples composantes (Note n°1).
Face à ce contexte, après presque cinq années de mise en œuvre, le programme d’Appui au Pilotage de la Qualité (APIQ) de l’Institut International de Planification de l’Éducation de l’’UNESCO à Dakar financé par l’Agence Française de Développement que nous avons contribué à mettre en œuvre de 2018 à 2022, ambitionnait d’avoir un impact significatif sur le fonctionnement des systèmes éducatifs en Afrique Subsaharienne. De nombreuses évidences suggèrent aujourd’hui que ce défi très ambitieux est très complexe à mettre en place si certaines conditions ne sont pas réunies. Pour réfléchir à ces conditions, il convient alors de réfléchir de manière approfondie sur ce que disent les enjeux et les problématiques résistantes identifiées par ce programme APIQ, qui nécessitent une analyse transversale pour voire « ce qui revient », notamment au travers de l’émergence et/ou le renforcement des résistances qui se manifestent en réaction aux changements proposés, espérés et/ou attendus. Deux enjeux stratégiques apparaissent alors comme cruciaux pour embarquer ces résistances dans des expérimentations contrôlées (micro recherche-action à visée stratégique) qu’il s’agit alors de décliner pays par pays, mais cette fois-ci avec leurs contingences et spécificités locales: 1) la question de la subsidiarité des niveaux décisionnels et 2) la question de l’autonomie/responsabilisation des acteurs notamment par le développement du travail entre pairs (collectif apprenant) mais aussi en inter-catégoriels (dialogue de gestion), dimensions qui entremêlent l’ensemble des problématiques identifiées (Note n°2).
Afin de mettre en place des interventions autour de ces deux enjeux il est nécessaire en amont de réfléchir aux conditions d’un développement efficient du pilotage de la qualité en Afrique Subsaharienne. Ce préalable passe par une réflexion spécifique sur la façon d’intervenir compte-tenu des spécificités propres des acteurs aux différents niveaux de l’administration car chacun dispose d’une plus-value respective. Un tableau de bord du pilotage de la qualité peut alors être élaboré en identifiant des repères théorico-pratiques, des enjeux, indicateurs et objectifs stratégiques calés sur les marges d’autonomie spécifiques de chaque acteur pour des interventions au niveau classe, école, mais aussi au niveau des services déconcentrés et centraux (Note n°3).
Cette réflexion permet également d’élaborer une réflexion spécifique sur les enjeux de la professionnalisation des cadres de l’éducation à partir d’une approche critique des paradigmes théoriques et des usages qui en sont faits notamment dans les politiques de développement de l’éducation en Afrique subsaharienne.
[1] Il est d’abord possible à la fois de citer les nombreux travaux auxquels les membres de l’équipe Od’écol ont contribué dans le cadre du programme APIQ de l’UNESCO et disponible sur le site de l’Institut et disponibles ici : https://dakar.iiep.unesco.org/programmes/atelier-regional-2022-les-principaux-leviers-pour-un-pilotage-efficace-de-la-qualite. Par ailleurs, de nombreux autres travaux d’évaluation et de recherche contribuent à décrire cette entropie des systèmes caractérisée par une situation permanente de faible qualité voire de détérioration de la qualité des apprentissages des élèves et des ressources disponibles.